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Oumou Sangaré, la classe attendue au Cully Jazz Festival
Le troisième concert de la tournée européenne d’Oumou Sangaré fut à l’image du festival qui l’accueillait: chaleureux, festif et conquérant!
Fréquentation maximum, vente de billets inégalée : 2009 est une année record pour le Cully Jazz. A l’issue de ce 27è Cully Jazz Festival, une question se pose: ce festival de la région lausannoise est-il entrain de s’imposer comme le Paléo du printemps. Cette année, en tous cas, le festival voit la vie en rose : plusieurs des soirées du chapiteau se sont jouées à guichets fermés, la bière et le vin coule à grands flots dans les caveaux et bars, la météo a été clémente et le public incroyablement réactif…
Car c’est bien ce qui fait un des points forts du festival : un public incroyablement réceptif et participatif. Dans les coulisses, tous les artistes le disent. Sur scène, lorsqu’ils saluent, beaucoup sont émus. Et comme dans tout bon rapport, il y a échange, Face à un tel accueil, les artistes « se donnent» beaucoup plus. Ce concept de va-et-vient Oumou Sangaré, la grande chanteuse malienne l’a longuement défendu sur scène, dans un français approximatif, mais ô combien séduisant. Elle l’a également démontré dans une prestation époustouflante. Oumou Sangaré, c’est LA grande chanteuse du Mali. Lorsqu’une de ces cassettes paraît, c’est tout Bamako qui reprend en chœur ces chansons, sur les ondes radio et télé, dans la rue et dans les foyers. Oumou Sangaré, c’est aussi la porte-parole des femmes. Elle a chanté sur l’excision, sur les mariages forcés, sur les contraintes familiales de toutes sortes. A Cully, Oumou veut se faire comprendre, elle résume en français la plupart de ces chansons avant de les interpréter. La plupart sont issues de son dernier disque, «Seya» qui vient de paraître et qui intègre pour la première fois cuivres et autres instruments occidentaux. Sur scène, Oumou se présente par contre avec un groupe «traditionnel» – deux percussionnistes (l’un à la calebasse, l’autre au djembé), un joueur de n’goni, un flûtiste, deux choristes.
Finalement pas grand chose n’a changé depuis la première fois qu’on avait vu Oumou Sangaré il y a une quinzaine d’années dans un petit club veveysan. Oumou Sangaré a juste rajouté un guitariste électrique et un bassiste à sa formation. Mais Oumou Sangaré n’est plus la jeune fille fluette des débuts, c’est une femme mûre qui s’est imposée dans son pays à la force de sa volonté. Main de fer dans gant de velours comme on dit. Et son band a gagné en puissance. Avec une telle personnalité, de tels musiciens, nul besoin de batterie ou de synthétiseurs, ça groove tout seul. Somptueusement vêtue d’un habit blanc aux broderies sophistiquées, Oumou est aussi la meilleure ambassadrice de la mode africaine. Ainsi drapée, elle tournoie sur elle-même et entraîne toute l’audience dans la tourbillon de ces chansons aussi engagées que dansante. Avec elle, le temps prend un sérieux coup d’accélérateur et on a l’impression que sa prestation d’une heure trente a duré une demi-heure… Elle culmine sur «Wele Wele Wintou», une chanson traditionnelle dont Oumou Sangaré a complètement réécrit les paroles pour en faire une ode à la femme joyeuse et épanouie. Son morceau préféré… et le nôtre aussi du coup.
Mon disque du mois de mars: Oumou Sangaré
Le retour de la diva malienne sur disque et sur scène. Avec une escale au Cully Jazz Festival le temps d’une soirée Vibrations, C’est vendredi 3 avril avec le duo Kouyaté-Neerman en première partie. A ne rater sous aucun prétexte!
Récemment invitée à participer à une carte blanche donnée au percussionniste indien Trilok Gurtu à la salle Pleyel à Paris, Oumou Sangaré apparaissait, en pantalons moulants, talons hauts et perruque africaine, avec tout le clinquant et la classe d’une authentique diva africaine. Son nouveau disque, «Seya», est à l’image de cette femme de tête : éclectique, inspiré et traversé de bout en bout d’une énergie indéfectible. Connue pour être la reine des rythmes du Wassoulou – une région au sud du Mali – Oumou Sangaré ose s’aventurer hors des sentiers connus. Sous l’égide de l’incontournable Cheikh Tidiane Seck, les cuivres, guitares électriques et violons déboulent en force pour renforcer les instruments traditionnels. Et Oumou se lâche. Le single «Seya» swingue et groove comme un morceau de funk. Entre deux phrases chantées, Oumou ose même un rire, décontractée et heureuse d’être à nouveau en studio.
Plus loin, sur une chanson contre les mariages forcés, elle opte pour des rythmes ultra-rapides, flirtant avec une musique de transe, fulgurante. Pour autant, elle n’en oublie pas ses origines : le répertoire et les rythmes caractéristiques des chasseurs du Sud («Donso»). Ni sa marque de fabrique : des ballades lancinantes aux paroles thérapeutiques. Ainsi «Djigui», un hymne de foi en la vie.
Arrivée au sommet de son art, cette femme hors du commun qui assume désormais pleinement sa double vie d’entrepreneuse – elle gère son propre hôtel à Bamako – et d’artiste.Un sacré parcours pour cette chanteuse qui débuta à l’âge de 13 ans pour gagner le pain de sa famille et qui dut vaincre pas mal de résistances dans un Mali où peu de femmes osent encore une telle émancipation. Chapeau.